Jacob Holmblad - Changement de route

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Ancien Vice-président (gestion technique) de l'ISO, Jacob Holmblad connaît parfaitement de l'intérieur la normalisation internationale et l'ISO, mais ses nouvelles responsabilités à l'extérieur de ce milieu lui ont ouvert les yeux pour la première fois sur la manière dont le monde nous voit - ou plutôt ne nous voit pas.

J’ai eu le bonheur d’avoir une carrière longue et stable, jalonnée de deux nominations principales seulement, chacune couvrant deux décennies. Ces deux expériences, très différentes, m’ont donné des perspectives intéressantes sur ces mondes professionnels, dont je puis voir aujourd’hui, de l’extérieur, les forces et les faiblesses.

Pendant 20 ans, j’ai maîtrisé les tenants et les aboutissants de la normalisation internationale à l’ISO. Il y a tout juste deux ans, j’ai décidé de franchir une nouvelle étape en acceptant un poste tout à fait différent au sein du plus grand fonds de pension du Danemark – à titre de contributeur, permettez-moi de le préciser, car je n’ai pas encore l’âge d’en être bénéficiaire ! Pourtant, le monde de la normalisation reste présent dans mon quotidien, professionnel et personnel, et la vie me rappelle constamment tout ce qui serait impossible sans l’ISO et ses membres.

Simplifier la complexité

On revient toujours à ses premières amours

Ainsi dit le proverbe, et il en ira de même pour moi avec les normes. Dans ma nouvelle vie, les souvenirs, la clairvoyance et le savoir associés à ce domaine refont surface de temps à autre et j’aime bien entretenir la flamme – c’est pourquoi je suis un fervent admirateur d’ISOfocus ! Je dois avouer que tous les mois, je me réjouis de m’immerger dans le nouveau numéro de ce magazine et de m’enrichir de connaissances nouvelles sur des sujets qui sont aujourd’hui le plus souvent étrangers à mes activités quotidiennes. À tel point que je puis aujourd’hui me tourner vers mon épouse et lui parler, tout en ouvrant déjà d’un doigt l’enveloppe en plastique du magazine pour me plonger bientôt dans la lecture. Pour moi, c’est un moment privilégié !

Prenons l’exemple du secteur financier. Son universalité et les réglementations rigoureuses auxquelles il doit adhérer en font un secteur d’une très grande complexité, dont le bon fonctionnement exige des outils avancés de management. Il s’appuie également sur un ensemble de valeurs centrales dont l’une a immédiatement attiré mon attention : la simplification. Or, je ne puis m’empêcher de penser que c’est là l’objet fondamental de la normalisation.

L’entreprise pour laquelle je travaille, PFA, comme de nombreuses autres, s’efforce d’être aussi efficace que possible dans ses opérations, processus et produits. Dans ce contexte, les mots « simplicité » et « normalisation » font souvent office de synonymes. Nous parlons d’« adopter des solutions normalisées », « appliquer des concepts simples », « créer une norme pour telle ou telle raison » et « apporter la preuve d’une amélioration continue ». Ce qui me frappe, c’est que ce langage s’emploie couramment en dehors du cercle de la normalisation tel que nous le connaissons.

Nous avons beaucoup d’outils intéressants à disposition dans notre entreprise, mais je n’y ai pas encore rencontré de normes au sens où l’entend l’ISO. Bien entendu, le monde dans lequel nous vivons n’est pas dépourvu de normes, mais ces dernières sont, en général, sectorielles et hors de nos domaines spécialisés, sont inconnues du grand public.

Cela s’explique par deux facteurs : un manque de connaissances générales sur la normalisation et l’approche profondément ancrée selon laquelle « nous voulons et savons tout faire par nous-même ». Pourtant, cette approche peut être coûteuse : réinventer la roue, c’est un incroyable gaspillage de temps et d’énergie. Notre entreprise connaît l’utilité des normes mais nous devons aller plus loin, nous écarter de notre approche sectorielle pour adopter une approche internationale.


Une image parfaite

L’organisme suédois de normalisation, SIS, a saisi l’essence de la normalisation dans une représentation d’un noyau familial – père, mère, fille et fils – profitant du soleil par une belle journée d’été dans la campagne suédoise. Dans cette image idyllique étaient disposés au bord d’un lac une tondeuse à gazon, des jouets, une maison et un bateau, chacun accompagné d’une bulle indiquant les nombreuses normes qui le sous-tendent. Pourtant, cette famille heureuse semblait loin de se douter que des normes permettent cette existence somme toute assez confortable.

Voilà une réalité bien connue de la communauté de la normalisation ! En considérant cet instantané avec un peu de recul, je m’aperçois qu’il saisit la mission de la normalisation, mais également ses failles. Le « manque de prise de conscience » montre à l’évidence que nous sommes trop nombreux à n’avoir pas compris le vrai sens et l’importance des normes.

Nous sommes trop nombreux à n’avoir pas compris l’importance des normes.

Je n’ai pas interrogé mes 1 200 collègues, mais je pense que la plupart correspondraient à ce profil. Lors des réunions, j’essaie de changer cet état de choses en leur parlant des normes, en leur montrant comment elles changent la donne.

Une vieille astuce est de mentionner ISO 9001… pour obtenir un : « ah oui, bien sûr ! ». Malheureusement, la prise de conscience s’arrête à cette exclamation. Cela montre bien la méconnaissance fondamentale de la valeur et du rôle des Normes internationales, un état de fait qui n’évoluera pas en incitant simplement mes collègues à acheter une norme.

Choisir les facteurs de réussite

Maintenant que je suis un « utilisateur » des normes, je suis beaucoup plus conscient de l’aptitude de l’ISO à détecter, saisir et développer des tendances durables pour le monde de l’entreprise et la société. La norme ISO 26000 relative à la responsabilité sociétale (RS) est un excellent exemple de la capacité de l’ISO à repérer et choisir les facteurs de réussite. En dépit de la crise économique actuelle et des conditions commerciales défavorables, un nombre considérable d’entreprises danoises, y compris la nôtre, s’efforcent systématiquement de documenter la responsabilité sociétale.

Ces efforts s’appuient sur la ferme conviction qu’une valeur ajoutée sera créée pour nos clients et que notre position sur le marché en sera améliorée.

Lorsque nous avons abordé la question de la responsabilité sociétale, je tenais à être impliqué et à aborder la RS sous un angle concret. Quelle n’a pas été ma surprise lorsque j’ai découvert que tout le monde était animé par des considérations et objectifs généraux, sans s’inspirer des lignes directrices de la norme ISO 26000, dont personne n’avait entendu parler.

La norme a été un révélateur pour mes collègues ! Je leur en ai remis un exemplaire et me suis attaché à la mettre en pratique pour stimuler, faciliter et systématiser notre tâche. Côté positif, la norme s’est avérée très utile. Côté négatif, nous ne nous étions pas tournés assez tôt vers cette norme, ce qui nous aurait permis d’épargner beaucoup d’énergie.

L’ISO a du chemin à faire pour que ses travaux soient plus visibles et accessibles, en particulier au niveau opérationnel et au niveau des utilisateurs. Ce n’est pas faute d’avoir essayé, car l’ISO a déployé de nombreuses ressources et une grande énergie pour développer son image de marque.

Il n’est tout simplement pas facile de communiquer sur les normes, parce qu’elles sont abstraites et techniques et couvrent de nombreux domaines. J’avais l’habitude de dire : « il suffit de demander quelque chose – nous l’avons ! ». Comme si tout cela n’était pas assez compliqué, la réussite de la communication passe par une coordination entre le Secrétariat central de l’ISO au niveau international et les comités membres de l’ISO au niveau national.

En conclusion, j’aimerais vous soumettre cette réflexion : je sais toute la quantité et la qualité de votre travail, mais ne vous reposez pas sur vos lauriers ! Continuez et accélérez le rythme, car le chemin est encore long. Si vous ne vous adaptez pas et ne vous développez pas, vous risquez l’échec. Le monde a besoin des efforts soutenus de l’ISO pour aider les clients à récolter tous les avantages des normes. La continuité des activités en particulier est un domaine où l’ISO peut avoir un impact significatif. Une fois que les entreprises se seront relevées de la tourmente qui fait rage depuis 2008, elles tireront les enseignements de cette expérience amère : une vigilance, une transparence constantes sont des prérequis pour faire face aux changements rapides, souvent inattendus du monde globalisé d’aujourd’hui.


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Elizabeth Gasiorowski-Denis

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